Diversité sur Bay Street : au-delà des chiffres
Pendant longtemps, ceux qui travaillaient sur Bay Street à Toronto, l’épicentre du milieu financier au Canada, formaient un groupe assez homogène d’hommes blancs plutôt âgés. Dennis Mitchell appartient au mouvement de renouveau de Bay Street. Homme noir dans la quarantaine, il a rapidement gravi les échelons de la direction dans le milieu de la gestion des placements, jusqu’à son poste actuel de chef de la direction de Starlight Capital, une société torontoise de gestion d’actifs. Grâce à ce qu’il représente aujourd’hui, Dennis s’efforce d’être un modèle pour les autres.
Dennis grandit dans le quartier High Park, dans l’ouest de Toronto, « avant qu’il devienne un quartier cool ». Sa mère est infirmière et son père, chauffeur de camion. Dennis rêve de jouer dans une ligue professionnelle de football, mais des chirurgies aux genoux l’obligent à changer ses projets. L’admiration qu’il voue depuis longtemps à Warren Buffett le pousse vers un nouvel objectif : une carrière dans la gestion d’actifs.
Dennis ne sait pas comment y arriver et il ne connaît personne dans ce milieu – ni parenté, ni amis, ni personnes-ressources. Sachant qu’il lui faudrait plus qu’un diplôme de l’Université Wilfrid Laurier pour se tailler une place dans ce milieu compétitif, il décide d’aller chercher ce qu’il lui faut pour « faire pencher la balance de mon côté ». Tout en finissant ses cours pour obtenir le titre d’analyste financier agréé, il réussit le programme accéléré de maîtrise en administration des affaires (MBA) de l’Université York (Schulich School of Business), augmentant ainsi ses chances de décrocher un emploi.
Il gagne son pari. Embauché par une société d’investissement, il gère un fonds immobilier qu’il fait passer de 8 millions à 1,5 milliard de dollars d’actifs. Sa réputation n’est plus à faire.
« Vous ne pouvez pas toujours choisir les personnes qui sont premières à la ligne d’arrivée », dit-il, faisant remarquer que la ligne de départ n’est pas la même pour tout le monde : certaines personnes viennent simplement au monde avec une longueur d’avance.
Ayant prouvé ses compétences comme gestionnaire de portefeuille, Dennis veut maintenant changer les pratiques d’embauche. S’inspirant du monde du football, il fait la promotion d’une version « modifiée » de la règle Rooney, une politique adoptée par la Ligue nationale de football en 2003 sous l’impulsion de Dan Rooney. Alors propriétaire des Steelers de Pittsburgh, Dan Rooney trouvait anormal que la plupart des joueurs de la ligue étaient Noirs alors que les entraîneurs et les propriétaires étaient majoritairement blancs. La règle Rooney exige qu’un certain nombre de candidats à des postes de direction soient des personnes de couleur. Dennis pense que cette règle ne fonctionne pas quand on l’applique de manière trop simpliste : « vous ne pouvez pas simplement parachuter n’importe quel mec noir pour le plaisir de cocher une case ». Dennis veut plutôt cultiver la diversité à tous les échelons de l’entreprise, de sorte que lorsqu’un poste se libère, le bassin de candidats admissibles est diversifié à la source : « vous formez vos candidats en interne ».
Pour former son équipe à Starlight Capital, Dennis sort du « circuit fermé » des écoles privées et des programmes universitaires qui fournissent généralement la main-d’œuvre à Bay Street. Il se tourne vers les médias sociaux et les réseaux personnels à la recherche de nouveaux visages qui reflètent le vaste monde dans lequel évolue son entreprise.
« Vous ne pouvez pas toujours choisir les personnes qui sont premières à la ligne d’arrivée », dit-il, faisant remarquer que la ligne de départ n’est pas la même pour tout le monde : certaines personnes viennent simplement au monde avec une longueur d’avance.
« Beaucoup de personnes ne sont pas conscientes de ce qu’elles sont capables d’accomplir, jusqu’à ce qu’elles voient quelqu’un qui leur ressemble le faire. »
En privilégiant la diversité chez les 19 personnes formant l’effectif de Starlight Capital, Dennis considère avoir augmenté le bagage de connaissances collectif au sein de l’entreprise et créé des phares pour guider des personnes qui pourraient se sentir à part dans le milieu financier. « Beaucoup de personnes ne sont pas conscientes de ce qu’elles sont capables d’accomplir, jusqu’à ce qu’elles voient quelqu’un qui leur ressemble le faire. »
Dennis voit Bay Street se transformer petit à petit, pas parce qu’on impose des quotas, mais parce qu’on sait que les milieux de travail plus diversifiés donnent un meilleur rendement. Voyant que les investisseurs s’intéressent maintenant plus aux valeurs d’une entreprise — les mesures prises pour garantir le développement durable, sa responsabilité sociale et la diversité de son effectif —, Dennis a bon espoir que le marché récompensera ceux qui font ce qui est juste et pénalisera ceux qui ne le font pas... et que, finalement, le milieu financier sera davantage à l’image du monde qui l’entoure et pourra mieux le servir.
chaque 1 $ gagné par les hommes blancs.
chaque 1 $ gagné par les femmes blanches. 87¢ / $1
des revenus moyens plus faibles que les autres
hommes. Ils ne gagnent que 66 ¢ pour chaque
1 $ gagné par les hommes non racialisés.
Fondation canadienne des relations raciales et Environics Institute for Survey Research. Les relations raciales au Canada 2019 – Une enquête sur l’opinion publique canadienne, 2019.
Centre canadien de politiques alternatives. Canada’s Colour Coded Income Inequality. 2019 (en anglais avec sommaire traduit).